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Utilisation de la modélisation 3D dans des longs métrages de premier plan pour Marvel, Disney et Universa

Débuter dans l’industrie cinématographique peut être un processus long et ardu ; il suffit de demander au célèbre directeur artistique Luke Whitelock. Il savait ce qu’il voulait dès son plus jeune âge et a pris des risques pour devenir ce qu’il est aujourd’hui. En tant que directeur artistique, Luke prend des idées et les met en scène. Il a travaillé sur les plateaux de grands films, notamment « Les Gardiens de la Galaxie », « Avengers: Infinity War » et « Maléfique : Maîtresse du Mal ». Il a eu des clients de toutes tailles, mais certains des plus marquants sont Marvel, Disney et Universal. Il est l’un des premiers à avoir commencé à utiliser SketchUp pour le cinéma et est connu comme le spécialiste de SketchUp au Royaume-Uni. Découvrez comment il utilise la modélisation 3D pour construire aujourd’hui certains des décors les plus emblématiques de l’industrie cinématographique actuelle.

Luke se tenant devant le décor terminé de la chambre à coucher de Jasmine, dans Aladdin. Crédit : Disney

Quel est votre parcours dans l’industrie cinématographique ?

Je savais dès mon plus jeune âge que je voulais travailler dans le cinéma. À l’école, j’ai eu des professeurs formidables qui m’ont encouragé et donné confiance en moi. Motivé, j’ai poursuivi mes études à l’Institut des arts de Bournemouth. J’ai commencé en suivant des cours élémentaires en art et en design, puis j’ai obtenu un diplôme national en production audiovisuelle, pour finalement opter pour un diplôme en production cinématographique, avec une spécialisation en direction artistique.  

Une fois diplômé, j’ai déménagé à Londres, bien que je ne dispose pas ou peu de contacts dans l’industrie. Tous les grands studios britanniques sont situés à la périphérie de la ville. La poignée de contacts que j’ai eus provenaient de professeurs invités que j’avais rencontrés pendant mes études. Grâce à l’un d’entre eux, j'ai eu ma première chance en travaillant sur une petite émission intitulée « Sugar Rush », en tant qu’assistant du département artistique. J’ai continué à travailler pour la télévision jusqu’à ce que j’obtienne mon premier emploi dans le long métrage « Elizabeth : l’âge d’or ». C’est à ce moment-là que j’ai découvert SketchUp. 

Après avoir découvert SketchUp, comment avez-vous commencé et où cela vous a-t-il mené ?

J’ai appris à dessiner les décors à la main sur d’énormes planches à dessin de taille A0, la bonne vieille technique de production. Les programmes de CAO étaient de plus en plus répandus et l’industrie les adoptait progressivement. Cependant, je n'étais pas vraiment fan du dessin CAO, qui me semblait si contraignant.

Lorsqu’un collègue m’a recommandé SketchUp, j’ai commencé à l’expérimenter pour voir comment je pouvais l’utiliser dans mon flux de travail et j’ai vite compris. Après quelques années d’essai, j’ai finalement décidé de ne plus dessiner sur des planches mais de tout faire dans SketchUp et LayOut. 

Aujourd’hui, je suis directeur artistique sur de grands films et j’ai travaillé pour des clients tels que Marvel, Disney et Universal. En tant que directeur artistique, mon travail consiste à prendre les créations des concepteurs de production et à les transformer en décors et en lieux constructibles. En général, je crée les décors dans SketchUp et les collaborateurs peuvent travailler à partir de ce modèle. Le fait de pouvoir travailler avec SketchUp m’a permis de créer une niche sur le marché britannique. Je suis donc souvent contacté par des personnes qui souhaitent savoir comment utiliser le programme dans leur travail.

Modèle SketchUp de la baie voûtée, version 1, chambre de Jasmine, Aladdin. Crédit : Disney

Modèle SketchUp de la travée cintrée, version 1, chambre de Jasmine, dans Aladdin. Crédit : Disney

SketchUp model of Jasmine's bedroom from Aladdin. Credit: Disney

Modèle SketchUp de la chambre à coucher de Jasmine, dans Aladdin. Crédit : Disney

Des moments marquants dans votre carrière ?

Faire partie de l'équipe derrière six films du Marvel Cinematic Universe (MCU) a été une source de grande fierté. Au début de tout projet cinématographique, l’équipe n’est jamais certaine de son succès ou de l’impact qu’il aura sur la scène culturelle, et je pense que le MCU a réussi. La conception des capsules pour « Avengers: Infinity War » a été un grand moment déterminant pour moi, et de travailler sur « Inception ». Pour « Inception », nous n’avions aucune idée de ce que nous faisions et ce film est devenu un classique. Il sera probablement étudié dans les écoles de cinéma pendant de nombreuses années.

Un grand moment dans la carrière de Luke, « Avengers: Infinity War ». Crédit : Marvel Studios

Un grand moment dans la carrière de Luke, « Avengers: Infinity War ». Crédit : Marvel Studios

Qu’est-ce qui vous passionne le plus dans cette industrie ?

Chaque journée est différente. Il y a toujours de nouveaux défis et c’est un secteur en constante évolution. Quand j’ai commencé il y a tant d’années, il y avait très peu de longs métrages réalisés au Royaume-Uni. C’était vraiment difficile de faire carrière, et j’ai souvent pensé à abandonner et à prendre un emploi régulier pour avoir un salaire stable. Mais peu à peu, les investissements ont augmenté et la confiance dans l’industrie cinématographique britannique est revenue. Désormais, nous en sommes à un point où certains des studios britanniques se développent rapidement pour les grands fournisseurs de services médiatiques tels que Netflix et Disney. Par exemple, les Shepperton Studios font l’objet d’une extension qui en fera l’un des plus grands studios au monde. Les Pinewood Studios s’agrandissent également et ajoutent des scènes. D’anciens studios qui ont fermé il y a quelques années rouvrent leurs portes en raison de la demande d’espace scénique. C'est une période très excitante pour l’industrie cinématographique.


Vous semblez créer de nombreux décors pour des films, ce qui demande bien sûr beaucoup de créativité. Quel est votre processus d’« idée » ou de « réflexion » ?

Je commence ce processus de différentes manières : le directeur artistique me confie un décor, le concepteur de la production me donne des idées, ou je peux avoir des concepts sur lesquels baser mes créations. Je commence ensuite à élaborer un modèle sur la base des informations qui me seront fournies. C’est un peu comme une sculpture sur laquelle où je travaille sur le modèle jusqu'à ce que quelque chose commence à fonctionner. Ensuite, il y a va-et-vient entre moi-même, le concepteur et le directeur des travaux. Nous sommes en mesure de verrouiller la conception en fonction du budget, du calendrier de tournage et des aspects pratiques, comme la possibilité de s’adapter à la scène, les considérations relatives à la charpente métallique et tous les éléments à prendre en compte sur le plan logistique dont la plupart des gens ne se rendent pas compte qu'elles entrent dans la conception d'un décor.

Après avoir réglé tous les détails du modèle, il est temps de lui donner vie. Chambre à coucher de Jasmine dans Aladdin. Crédit : Disney

Après avoir réglé tous les détails du modèle, il est temps de lui donner vie. Chambre à coucher de Jasmine dans Aladdin. Crédit : Disney

Comment passe-t-on d’une idée SketchUp à un décor construit pour un long métrage ?

Je dois tenir compte de l’aspect pratique de la conception. J’entends par là que je dois examiner minutieusement le dessin pour savoir comment le construire. Je prends notamment en compte les éléments suivants : si le décor est monté sur un cardan (une plateforme mobile), si les murs doivent flotter pour permettre l’accès à la caméra ou les différents mouvements de caméra. Je dois être capable de visualiser toutes ces choses.

Cela me facilite la vie de savoir que nous avons testé quelque chose dans le modèle SketchUp et que cela a fonctionné.

Tests de différents angles dans la chambre et sur le balcon de Jasmine, dans Aladdin. Crédit : Disney

Tests de différents angles dans la chambre et sur le balcon de Jasmine, dans Aladdin. Crédit : Disney

La modélisation 3D est-elle importante dans l’industrie cinématographique aujourd’hui ? 

Avec la prévalence de la réalité virtuelle, elle est plus importante que jamais. Vous pouvez construire le décor dans SketchUp et le réalisateur peut effectuer une visite virtuelle avec le concepteur. Il est fascinant de constater à quel point cette technologie a changé l’essence même de notre activité. Les modèles 3D sont d’excellents outils de communication visuelle. Si des charpentiers regardent mon dessin et ne parviennent pas à comprendre comment un élément s’intègre, ils peuvent m’appeler et je peux tourner autour du modèle et leur envoyer une capture d’écran de la vue 3D. Cela leur permet de comprendre comment quelque chose doit être construit. J’ai également travaillé avec des charpentiers dans SketchUp Viewer for Desktop.

Cela leur permet d’avoir le modèle principal sur un ordinateur dans leur atelier afin de pouvoir en visualiser certaines parties sans risquer de le modifier accidentellement. Il s’agit d’une aide précieuse.

Luke passant en revue les détails du modèle « Maléfique : Maîtresse du Mal », crédit : Disney

Luke passant en revue les détails du modèle « Maléfique : Maîtresse du Mal », crédit : Disney

À quoi ressemble votre flux de travail dans SketchUp ?

Je gère l’ensemble de mon flux de travail dans SketchUp, ce qui signifie que toute personne qui collabore avec moi peut travailler à partir de mon modèle original. Par exemple, j’utilise le fichier maître pour confier les détails aux dessinateurs du département.

Je commence le processus en bloquant la structure globale et en configurant mes vues en coupe comme des scènes dès le début. Cela permet de gagner du temps si l’on me demande soudainement un projet ou des travaux de façade en cours, car le modèle est lié dynamiquement avec mon fichier LayOut. Quel que soit l’état d’avancement du processus de modélisation, il y a toujours un plan d'avancement disponible pour l'impression au pied levé. En raison de la taille des scènes, la largeur, la longueur et la hauteur sont normalement définies assez tôt pour un décor. Je vais prendre ces dimensions et dessiner les murs et les sols du décor dans le modèle. À ce stade précoce, tout va dans Layer0, ce qui me permet de travailler rapidement. Comme je l’ai déjà dit, je vois mon processus de conception comme la construction d’une sculpture : je commence par des blocs 3D et je les découpe progressivement en composants et en groupes. Bien souvent, la façon dont je travaille influe sur la conception au fur et à mesure que j’avance. 

Je suis très attaché aux bonnes pratiques en matière de modélisation 3D dans SketchUp. Ainsi, la première chose que je fais est de m’assurer que tout se retrouve sous la forme d’un composant ou d’un groupe nommé et qu’un calque lui est attribué. La deuxième pratique de modélisation que j’adopte est que je modélise tout comme un solide. J’exécute régulièrement l’extension CleanUp pour veiller à ce que le modèle soit léger, propre et exempt de géométrie, de textures et de composants inutiles. La troisième pratique de modélisation consiste à cacher tout ce qui n’est pas visible sur une scène. Cela m’aide lorsque j’essaie de rendre un modèle particulièrement grand et complexe ; cela élimine les objets invisibles. La quatrième astuce consiste à désactiver les ombres jusqu’à ce que le dessin soit terminé. J’activerai les ombres pour la validation finale du dessin. En ce qui concerne les styles, j’ai choisi une couleur de ligne gris foncé, pour que l’impression ressemble davantage à celle d’un crayon. J’active les profils, je fais en sorte que le remplissage de la section soit blanc, que la couleur de la ligne de section soit noire et que la largeur de la ligne de section soit de 1. Toutes ces modifications de style permettent de faire ressortir le dessin dans LayOut. 

Pour les sections, j’exporte la coupe de la section vers un nouveau fichier SketchUp, je configure une scène et j’obtiens deux copies côte à côte. Une copie est destinée au travail au trait uniquement et l’autre aux hachures. J’utilise la commande de remplissage de JHS PowerBar pour remplir la section, puis j’utilise le plugin HatchFace pour hachurer. J’ouvre ensuite ces fichiers dans LayOut et je superpose les hachures de la section et le travail au trait pour obtenir des sections nettes. Cette méthode me permet d’avoir un contrôle total sur le poids des lignes dans la coupe de la section. Je règle toujours le travail au trait en vectoriel et les hachures en rendu hybride. 

Si je travaille avec un dessinateur qui utilise un autre programme, en général, j’exporte les détails dont il a besoin à partir de mon modèle, sous forme de fichier DWG ou OBJ. Dans 99 % des cas, il peut ouvrir l’exportation dans AutoCAD ou Vectorworks afin d’achever le dessin. 

En fin de compte, tout provient de mon modèle original, ce qui signifie que nous pouvons toujours nous référer au fichier maître si quelque chose ne colle pas.

Chambre de Jasmine dans SketchUp, version 2, Aladdin. Crédit : Disney

Chambre de Jasmine dans SketchUp, version 2, Aladdin. Crédit : Disney

 Fichier LayOut : Cour des armes d’Agrabah, balcon des marchands et élément de l’arche, Aladdin. Crédit : Disney

Fichier LayOut : Cour des armes d’Agrabah, balcon des marchands et élément de l’arche, Aladdin. Crédit : Disney

Fichier LayOut : Chambre et balcon de Jasmine, Aladdin, Crédit : Disney

Fichier LayOut : Chambre et balcon de Jasmine, Aladdin, Crédit : Disney

Quels sont les avantages de SketchUp pour vous ?

SketchUp me fait gagner du temps et constitue un outil de visualisation extraordinaire ; c’est la clé de ma méthode de conception.

Depuis, j’ai dit adieu au dessin en 2D sur papier. SketchUp a pour principal avantage de pouvoir montrer clairement mes dessins aux membres de l’équipe ou au concepteur de la production. Il est plus facile pour eux de comprendre mes idées lorsqu’ils les voient en 3D. Par ailleurs, je n’ai pas à me soucier des modifications ou des retours. Autrefois, la modification d’un détail pouvait prendre une journée lorsqu’on dessinait sur une planche, mais aujourd’hui ce n’est plus qu’une question d’heures. Cela signifie que je peux passer plus de temps à affiner les conceptions et moins de temps à les retravailler.

Quels sont vos projets préférés ?

L’un de mes projets préférés a été « Les Gardiens de la Galaxie », car j’y ai pris beaucoup de plaisir. Nous avons tourné pendant un superbe été en 2013, et je me souviens que ce fut le premier film où j’ai utilisé uniquement SketchUp et LayOut. Ce fut une révélation pour moi de voir combien de temps je gagnais en ne dessinant pas sur la planche. Un autre projet préféré a été « Maléfique : Maîtresse du Mal », qui a été mon premier emploi en tant que directeur artistique. Je serai éternellement fier de ce film. 

J’ai également travaillé sur « Prometheus », et qui ne veut pas travailler sur un film d’extraterrestres avec Ridley Scott, ou « Inception » avec Christopher Nolan ? J’ai beaucoup de chance de me trouver dans ces situations, mais cela n’a pas été facile d’y arriver. Il m'a fallu travailler très dur pour y parvenir.

Fichier LayOut de la Grande salle, Maléfique : Maîtresse du Mal. Crédit : Disney

Fichier LayOut de la Grande salle, Maléfique : Maîtresse du Mal. Crédit : Disney

La Grande salle a pris vie, Maléfique : Maîtresse du Mal. Crédit : Disney

La Grande salle a pris vie, Maléfique : Maîtresse du Mal. Crédit : Disney

Impressionnant ! Tous ces projets semblent incroyablement amusants et intéressants. Vos efforts ont sans aucun doute porté ses fruits !

Quelle est votre commande SketchUp préférée ?

La commande Z ! Ah ah. Non, je pense que ma commande préférée est la fonction ‘push/pull’ (d’insertion/extraction). Il s’agit de l’essence même de SketchUp et la raison pour laquelle je me suis senti en confiance en utilisant le programme.

La facilité d’utilisation et l’intuitivité avec lesquelles j’ai pu prendre en main le programme si rapidement sont les raisons pour lesquelles je suis ici à faire ce que je fais aujourd’hui. 

Utilisez-vous des extensions ?

Oui, j’en utilise beaucoup dans mon flux de travail. Certaines extensions que j'utilise régulièrement sont RoundCorner, Hatch Face, QuadFace Tools, Power Bar, Fredo Scale, Solid Inspector 2, GKWare Stair Maker, CleanUp, Mirror, V-Ray, Solar North, SubD, 1001 Bit Pro. Il y a tellement d’excellents plugins et un grand merci à tous ces développeurs qui proposent des scripts.

Luke se tenant fièrement dans la Grande salle, Maléfique : Maîtresse du Mal. Crédit : Disney

Luke se tenant fièrement dans la Grande salle, Maléfique : Maîtresse du Mal. Crédit : Disney

A propos de l'Auteur

Lorsque Cara n’est pas en train d'écrire du contenu ou de se familiariser avec les flux de travail des clients, elle aime grimper sur des sommets à plus de 4 000 m d'altitude, dévaler les pistes de ski du Colorado et enchaîner les épisodes de ses séries Netflix préférées sur son canapé.

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